Avant-propos
Dans un article précédent, “Que s’est-il passé le 24 avril 1915”, nous nous étions penchés sur la portée historique de cette date commémorative que certains groupes de pression ethnocentriques, ces “gardiens de la pensée unique” qui s’engagent activement à protéger leur lecture de l’Histoire de toute dissidence ou information contraire, veulent soustraire à tout examen objectif.
En ce jour de 24 avril 2019, nous tenions à confondre ceux qui, depuis plusieurs décennies, ont pour seul objectif de détourner l’Histoire au profit de leur propre agenda politique. Nous avons tenu à porter à votre connaissance, un article publié par l’historien français Maxime Gauin dans Actualité News.
Maxime Gauin, spécialiste de l’histoire ottomane tardive, nous démontre en quelques points fondamentaux pourquoi les événements de 1915 ne peuvent être qualifiés de “génocide”.
Nous souscrivons à ses arguments, mais nous souhaitons ajouter deux précisions, d’ordre juridique, qui nous paraissent importantes : la première porte sur la dimension juridique du terme de ” génocide ” — terme légal strictement encadré par la Convention de l’ONU du 9 décembre 1948 sur la prévention et répression du crime de génocide (non rétroactivité, besoin impératif d’une décision d’une cour compétente sur le dolus specialis, c’est à dire, selon l’Art. II, sur une intention avérée ” de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux “) — et, la deuxième, sur le non-lieu prononcé en septembre 1921 par les Britanniques lors de l’enquête judiciaire de Malte à l’encontre des 144 hauts dignitaires ottomans suspectés, à tort, d’avoir encouragé les massacres des Arméniens (ce qui répond à l’exigence d’une décision d’un tribunal compétent selon l’Art. VI de ladite convention).
On ne voit pas bien, dans les dossiers, de quelles preuves disposent les autorités britanniques [contre les Turcs détenus à Malte], si elles en disposent, mais il est évident, en lisant la dépêche du procureur général, qu’à son avis, ce ne serait pas suffisant pour obtenir leur condamnation par une cour de justice. »
Lettre du juge Lindsay Smith au haut-commissaire britannique à Istanbul — 24 août 1921
(The National Archives, Londres-Kew Garden, FO 371/6504/E 10023)
Il est intéressant de noter que ce non-lieu, qui disculpe les dignitaires ottomans de tous crimes à l’égard des Arméniens — comme l’avait d’ailleurs pressenti le pape Benoît XV qui, en février 1920, avait soutenu ces mêmes dignitaires, dont le Vizir Sait Halim Pacha (voir les lettres du 17 et 25 février 1920 du Vatican à l’adresse du Secrétaire d’État aux Affaires étrangères du Royaume-Uni, Lord Curzon) — non seulement corrobore, en tout point, le rapport “Niles et Sutherland” de la commission d’enquête diligentée, en Anatolie de l’est du 14 juillet and 12 août 1919, par le gouvernement des Etats-Unis (Archives nationales N° 184.021/175), mais expose au grand jour les crimes commis par les Arméniens sur les populations, entre autres, turques et kurdes :
Sans nous perdre dans le récit détaillé de nos enquêtes, l’un des faits les plus marquants qui ont retenu notre attention, c’est qu’en chaque lieu, de Bitlis à Trébizonde [Trabzon], dans cette région que nous avons traversée, les Arméniens commirent contre les Turcs tous les crimes et toutes les atrocités commises par des Turcs à l’encontre d’Arméniens.
Au début, nous accueillîmes ces récits avec un grand scepticisme, mais l’unanimité des témoins, le désir évident que ceux-ci avaient de parler de ce qu’ils avaient subi, la haine des Arméniens, et, surtout, les preuves matérielles nous ont convaincus de la véracité générale des faits suivants : premièrement, des Arméniens ont massacré des musulmans en grand nombre, avec bien des raffinements de cruauté ; et, deuxièmement, les Arméniens sont responsables du plus grand nombre de destructions dans les villes et les villages.
…Ces évidences n’étaient pas ce que ceux au pouvoir souhaitaient entendre. »
Rapport de la commission d’enquête Niles & Sutherland – 1919
Archives nationales des Etats-Unis N° 184.021/175
Prétendre que les événements de 1915 survenus à la fin de l’Empire ottoman sont constitutifs d’un acte génocidaire est un affront fait aussi bien à l’Histoire qu’au Droit.
Ceux qui, pour telle ou telle raison, continue obstinément d’imposer une lecture partisane de l’histoire, se rendent coupables « d’éthocide arménien » (du grec ethos « la science morale » soit l’éthique, et du latin cida (« frapper, tuer ») !
Or,
L’éthocide est un crime de conscience et sa sanction,
si jugée par un tribunal compétent,
est la disgrâce publique et la honte.Ergun Kirlikovali
Chercheur et ancien Président
de l’Assemblée des associations turco-américaines
Vous avez été nombreux à nous demander la version PDF de cet argumentaire sur 1915. Elle est téléchargeable en cliquant sur ce logo.
Bonne lecture.
“1915 : le communautarisme contre l’Histoire”
La tragédie turco-arménienne de 1915 est, comme l’ont jugé la Cour européenne des droits de l’homme et le Conseil constitutionnel français, l’objet de débats historiques 1. Mais nul ne saurait débattre sans arguments. Pour introduire la question, voici donc des explications sur les points essentiels : l’origine des événements ; la décision prise par le gouvernement ottoman ; les conditions du déplacement forcé ; et enfin, une mise au point sur des arguments en faveur de la qualification de « génocide ».
Comment en est-on arrivé à 1915 ?
La première révolte organisée par des nationalistes arméniens a lieu à Zeytun (aujourd’hui Süleymaniye, une des très rares bourgades essentiellement peuplées d’Arméniens en Anatolie, à l’époque) en 1862, après plusieurs années de propagande politique venue de Russie (ndlr : voir Le Tsarisme en Asie-Mineure, les origines du problème arménien – Edgar Granville – La Revue politique internationale – v.7 (janvier – juin 1917). L’action des meneurs est d’ailleurs coordonnée avec des Arméniens russes 2. D’autres révoltes avaient déjà eu lieu dans cette commune depuis 1780, mais il s’agissait de révoltes fiscales. Zeytun se soulève de nouveau en 1878, dans le contexte de la guerre russo-ottomane de 1877-1878 3. À partir de 1880, quand le turcophile Benjamin Disraeli perd les élections législatives britanniques au profit du turcophobe William Gladstone, les premiers nationalistes arméniens commencent à regarder du côté des fondamentalistes du monde anglo-saxon 4.
Ils se structurent en partis : l’Armenakan en 1885, le Hintchak en 1887 et la Fédération révolutionnaire arménienne (FRA ou FRA-Dachnak) en 1890. La stratégie suivie par le Hintchak à partir de 1890, puis par la FRA à partir de 1896, consiste à organiser des attentats, soulèvements, etc., visant les civils musulmans et notamment kurdes, pour provoquer des représailles sanguinaires sur les Arméniens ordinaires, et ainsi obtenir une intervention militaire — russe ou britannique 5. La technique n’est pas nouvelle : c’est celle employée par les nationalistes bulgares en 1876, pour obtenir (avec succès) une intervention russe, nécessaire puisque les musulmans (Turcs et Pomaks) représentaient entre 45 et 49 % de la population de la Bulgarie, en sus des catholiques et des Juifs 6, aussi hostiles que les musulmans à la sécession du pays 7. Des représailles ont effectivement eu lieu dans certaines provinces, surtout en 1895 et 1896, mais aucune intervention militaire ne se produit.
Les nationalistes arméniens sont ensuite affaiblis par la répression plus efficace menée par la police ottomane de 1905 à 1908 8, et par le conflit entre la FRA et la Russie tsariste, à partir de 1904-1905 9. Après la révolution dite jeune-turque (juillet 1908), la FRA collabore avec le Comité union et progrès (le CUP, qui prend progressivement le pouvoir dans l’Empire ottoman) contre la Russie, jusqu’aux premières semaines de 1912. Mais outre que certains nationalistes arméniens ne sont pas d’accord avec cette ligne (d’où les affrontements sanglants à Adana en 1909) 10, la FRA rompt avec le CUP en 1912, et en décembre de cette année-là, assassine le maire de Van, Bedros Kapamaciyan, un Arménien loyaliste très favorable au CUP 11.
Pourquoi la décision de déplacer a-t-elle été prise 12 ?
Il est exact que les guerres balkaniques (1912-1913), les pertes territoriales entraînées par la première (pertes qui concernent des territoires peuplés en majorité de musulmans, surtout turcs, sauf la ville de Salonique, à majorité juive) et la purification ethnique employée par les vainqueurs, surtout grecs et bulgares (1 450 000 morts et 400 000 réfugiés parmi les Turcs et autres musulmans) 13 traumatisent le gouvernement CUP et la population ottomane musulmane. Néanmoins, la politique de réinstallation des réfugiés, de 1912 à 1914, demeure complètement empirique et ne saurait en aucune manière être assimilée à une « ingénierie démographique » qui pourrait conduire, in fine, au « génocide 14 ». De même, le CUP n’adopte aucune politique panturquiste (projet d’un État panturc, des Balkans au Turkestan oriental) 15 : au contraire, les partisans de cette politique sont réprimés en 1913 16.
La décision de déplacer une partie des Arméniens ottomans, de plusieurs régions d’Anatolie, notamment orientale, vers d’autres et surtout vers les provinces arabes, est une décision militaire répondant à un problème militaire. Comme l’indique Hovannès Katchaznouni, dirigeant de la FRA et premier chef de gouvernement de l’Arménie indépendante (1918-1919), son parti proclame certes sa neutralité lors de son congrès tenu en août 1914, mais il viole sa propre résolution juste après, commençant à recruter des volontaires (y compris de nationalité ottomane) pour l’armée russe dès cet été-là 17. Ainsi, le 29 octobre 1914, le consul britannique à Batoum estime le total de ces volontaires à presque 45 000 18. À Erzurum, les désertions (principalement d’Arméniens) atteignent des proportions hémorragiques dès avant l’entrée en guerre de l’Empire ottoman (le 2 novembre 1914), des armes sont distribuées secrètement par la Russie à la FRA locale 19, et le premier affrontement entre une bande de révolutionnaires arméniens et l’armée ottomane a lieu en octobre 1914 20. Il est rigoureusement impossible d’invoquer une quelconque « autodéfense » : le 3 juillet de cette année, le consul britannique à Erzurum qualifiait d’« admirable » la sécurité dans cette région 21.
De même, en octobre 1914, le vice-consul de France félicite Tahsin Bey (gouverneur de Van jusque-là, qui vient d’être nommé préfet d’Erzurum), pour son œuvre énergique de restauration de l’ordre public 22. Or, dès la fin de 1914, des bandes de partisans arméniens entre en action dans cette province, et le 7 avril 1915, la ville est lieu d’un soulèvement, coordonné avec les envahisseurs russes et leurs unités de volontaires arméniens 23. La révolte de Van suscite des émules dans d’autres provinces, Sivas par exemple, avec une stratégie précise : couper les lignes télégraphiques, attaquer les rares routes d’Anatolie orientale assez larges et assez solides pour que les convois d’approvisionnement puissent y passer 24. Les insurgés comme les volontaires commettent, dès la fin de 1914, une série de massacres contre les civils musulmans et juifs, qui continue jusqu’en 1918 et même au-delà 25.
Dans le même temps, éclate une révolte à Zeytun et des groupes d’insurgés se forme plus au sud, se préparant à un débarquement anglo-français depuis Chypre 26. Pour des raisons qui seraient trop longues à expliquer ici 27, les projets de débarquement massif ne sont pas concrétisés, mais en décembre 1914 et dans les premiers mois de 1915, des opérations limitées ont lieu, visant notamment la voie de chemin fer reliant Istanbul et l’Anatolie aux provinces arabes. Ces opérations ont lieu avec la coopération active d’Arméniens locaux 28.
En mars-avril 1915, la politique du gouvernement ottoman consiste en des déplacements localisés (expulsion des Arméniens de Zeytun, par exemple) et des opérations de police, la plus connue étant celle des 23 et 24 avril : 180 personnes arrêtées, cinquante-cinq autres dans les jours suivants ; sur ces 235, dix-huit sont condamnées à mort et exécutées ; une seule meurt en prison ; dix-neuf Mauser (pistolets convertibles en carabines), soixante-quatorze fusils Martini, cent onze carabines Winchester, 3 591 pistolets et 45 221 cartouches pour pistolet sont saisis au domicile des suspects 29.
À la fin de mai 1915, le gouvernement ottoman constate que ces mesures ne suffisent pas ; or, l’essentiel de l’armée se trouvant au front, il décide d’employer une technique déjà utilisée par l’armée espagnole contre les indépendantistes cubains (1896-1898), par l’armée américaines contre les indépendantistes philippins et par l’armée britannique contre les Boers en Afrique du sud (1899-1901) : un insurgé doit boire et manger ; donc une insurrection n’est dangereuse que si elle soutenue de gré ou de force par toute ou partie de la population civile ; donc, si l’élimination d’une insurrection est impossible par des moyens conventionnels, il faut déplacer les civils, afin de priver les insurgés de tout appui matériel 30.
Comment ce déplacement forcé s’est-il déroulé ?
Pour commencer, il est indispensable de souligner qu’il ne s’agit pas d’un déplacement total. Au moins 350 à 400 000 — et plus probablement 500 000 — Arméniens ottomans ne sont pas concernés du tout (à Istanbul, Izmir, Konya, Kütahya, Alep, etc.), sans compter les milliers au moins, les dizaines de milliers plus probablement, qui sont déplacés à l’intérieur même de l’Anatolie 31. Parmi les exemptés, relevons Artin Boşgezenyan, député d’Alep, membre du CUP et de son groupe parlementaire ; Onnik Ihsan, député sans étiquette d’Izmir ; Dikran Barsamian, député sans étiquette de Sivas 32 ; Manuk Azaryan, sénateur 33 ; Hrant Abro, conseiller juridique du ministère ottoman des Affaires étrangères de 1914 à 1922, membre de la délégation signant la paix avec la Russie soviétique en février 1918 ; et Berç Keresteciyan, directeur général adjoint de la Banque ottomane, promu directeur général à la fin de 1914 (poste qu’il conserve jusqu’en 1927 ; il finit sa vie publique comme député d’Afyon à l’Assemblée nationale turque, de 1935 à 1946) 34. Le total des pertes ne s’élève pas à 1 500 000 comme il est affirmé sans citer un seul document, mais autour de 600-642 000 35, y compris les 150 000 morts lors du déplacement par l’armée russe vers le Caucase et les 50 000 réfugiés qui ont péri lors des épidémies à Erevan en 1918-1919 36.
S’agissant maintenant des massacres d’Arméniens déplacés, ils ne sont généralisés ni dans le temps du déplacement forcé ni dans l’espace ottoman 37. Même certains partisans de l’accusation de « génocide » (ceux qui ont une formation d’historien et qui ont travaillé aux archives ottomanes : ce n’est pas un hasard) l’admettent désormais 38. Ces actes sont formellement interdits par le gouvernement ottoman, qui mène, à partir de l’automne 1915, une répression sans faiblesse : à la suite d’interventions individuelles du ministère de l’Intérieur, Talat (ndlr : Talat Pacha), plus de vingt musulmans sont condamnés à mort et exécutés, entre octobre et décembre 1915, pour des faits d’homicides volontaires sur des Arméniens déplacés 39. Comprenant que ces interventions ne suffisent pas, Talat présente, en conseil des ministres, un rapport visant à créer trois commissions d’enquête pour recueillir les plaintes des Arméniens et les dénonciations des fonctionnaires honnêtes. Le rapport est adopté le jour même 40. Rien qu’entre février et mai 1916, soixante-sept condamnations à mort, 527 à une peine de prison et soixante-huit à d’autres peines (exil, travaux forcés, réclusion avec régime de forteresse) sont prononcées, à la suite des travaux de ces commissions 41. D’octobre 1915 à janvier 1917, le total s’élève à 1 397 42.
Les documents sont si clairs que certains ne trouvent rien de mieux que de les falsifier. Ainsi, le sociologue allemand Taner Akçam (souvent présenté comme « un historien » [ndlr : mais dont les manipulations ont été mises au grand jour à plusieurs reprises, entre autres, par les chercheurs Erman Şahin et Sean Patrick Smyth]) prétend que la meilleure preuve d’une intention génocidaire est un télégramme envoyé par le ministre de l’Intérieur Talat à la préfecture d’Ankara, le 29 août 1915 43.
Or ce document dit :
« La question arménienne qui se posait dans les provinces orientales est résolue. Pour autant, il est inutile d’endommager l’image de notre nation et de notre gouvernement par des actes de cruautés qu’aucune nécessité ne justifie. En particulier, l’attaque récente qui a eu lieu contre des Arméniens près d’Ankara a causé beaucoup de regret au ministre, qui a constaté que l’évènement s’est produit suite à l’évidente incompétence des officiers chargés de superviser le transfert des Arméniens, et à l’audace de gendarmes et d’habitants de la région, qui ont agi en suivant leurs instincts bestiaux, violant et volant les Arméniens. Le transfert d’Arméniens, qui doit être appliqué dans l’ordre et avec prudence, ne doit jamais, à l’avenir être confié à des individus animés d’une hostilité fanatique, et les Arméniens — tant ceux qui sont transférés que les autres — doivent absolument être protégés contre toute agression, contre toute attaque. Dans les lieux où une telle protection ne pourrait pas être assurée, le transfert doit être reporté. À partir de maintenant, les officiers chargés [du transfert] seront tenus pour responsables, compte tenu de leur rang, de toute attaque qui se produirait, et renvoyés en cour martiale. Il est nécessaire de donner des ordres très stricts à cet égard, au personnel concerné 44. »
Qu’est-ce qui est avancé pour parler de « génocide » ?
- Le livre de Mevlanzade Rifat
En 1929, un nommé Mevlanzade Rifat, qui se présente comme un ancien dirigeant du CUP, publie à Alep (Syrie) un livre où il accuse ce parti d’avoir organisé « l’extermination » des Arméniens ottomans et produit même ce qu’il présente comme le procès-verbal d’une réunion en ce sens. Or, Rifat n’a jamais été dirigeant du CUP ; bien au contraire, opposant farouche à ce parti, il a été condamné à l’exil en 1909 et n’est rentré à Istanbul qu’en 1918. Ce fils d’une riche famille kurde s’exile ensuite définitivement en 1922 et devient dirigeant fondateur du Hoyboun (nationaliste kurde, ancêtre du PKK), en 1927. Or, le Hoyboun signe, l’année de sa création, un accord avec les nationalistes arméniens de la FRA 45 — accord allant si loin que, dès 1927, Vahan Papazian est en même temps membre du comité central de la FRA et de celui du Hoyboun.
Bien que ce livre soit tout sauf crédible, il continue d’être cité comme source 46.
- Les « Dix commandements »
En 1919, un informateur a remis au haut-commissariat britannique le double d’un texte non daté et non signé, le présentant comme le procès-verbal d’une réunion du CUP tenue en décembre 1914 ou janvier 1915. Or, après avoir manifesté leur intérêt, les autorités britanniques, qui tentaient alors de juger 144 ex-dignitaires ottomans arrêtés à Istanbul et détenus à Malte ont perdu toute confiance dans ce texte, proposé par un informateur connu pour avoir fabriqué un faux télégramme qu’il attribuait au numéro 3 du régime CUP, Cemal Paşa (ndlr : Djémal Pacha) 47.
Ajoutons que cet informateur (unique source sur la fiabilité de ce texte) affirme que Bahattin Şakir (ndlr : Shakir), un des dirigeants du CUP, avait participé à cette réunion. Or, Şakir n’était à Istanbul ni en décembre 1914, ni en janvier — ni d’ailleurs en février — 1915 : il était à Erzurum 48. Il convient de noter que Donald Bloxham, professeur d’histoire à l’université d’Édimbourg et partisan résolu de la qualification de « génocide arménien » considère que « Les historiens les plus sérieux considèrent ce document comme d’une authenticité au mieux douteuse, et qu’il s’agit probablement d’un faux. […] Celui qui a remis ce document aux Britanniques le leur a vendu en février 1919, une époque où beaucoup de faux documents étaient en circulation 49. » Néanmoins, cette honnêteté de M. Bloxham à cet égard est plus l’exception que la règle parmi les partisans de la qualification de « génocide arménien » 50.
- Les « Documents Andonian »
En 1920, Aram Andonian, membre du parti nationaliste arménien Ramkavar, publie à Paris ce qui se présente comme un recueil de « documents » prétendument signés par d’ex-responsables politiques et administratifs de l’Empire ottoman, principalement Talat, ministre de l’Intérieur de 1913 à 1917 puis grand vizir de 1917 à 1918. Une version anglaise, plus courte, paraît à Londres et une version arménienne, plus longue, est éditée à Boston en 1921. Or, les originaux n’ont jamais pu être montrés (ils sont supposés avoir disparu, sans aucune explication) et les reproductions photographiques (quand Andonian a daigné en produire) révèlent de très nombreuses aberrations.
Sauf deux d’entre eux, les « télégrammes » ne sont pas écrits sur du papier à en-tête du ministère de l’Intérieur (la pénurie de papier à en-tête alléguée parfois pour expliquer cette anomalie n’existe que dans l’imagination de ceux qui l’allèguent) ; quatre sont même écrits sur du papier d’école, à double lignage (montrer des documents authentiques à simple lignage est donc sans aucune pertinence) ; la numérotation ne correspond pas au cahier de registre du ministère de l’Intérieur, et contient des contradictions internes (Andonian a, par exemple, attribué le même numéro à deux « télégrammes » supposés avoir été envoyés par le même ministère, la même année, à plusieurs mois d’intervalles) ; les signatures dans les « documents Andonian » sont très différentes de celles des documents authentiques ; etc. 51
- Le livre signé par Henry Morgenthau
En 1918, Henry Morgenthau, ambassadeur des États-Unis à Istanbul, publie un ouvrage qui se présente comme ses Mémoires d’ambassade. La question est simple à résumer : outre qu’il s’agit d’un ouvrage explicitement raciste 52, aucun des « aveux » que Morgenthau et ceux qui ont écrit le livre avec lui mettent dans la bouche de dirigeants ottomans et de diplomates allemands ne se trouve dans les documents de Morgenthau lui-même, c’est-à-dire son journal, sa correspondance avec le Département d’État (ministère américain des Affaires étrangères) et sa correspondance personnelle avec sa famille
Comme le journal de Morgenthau pendant son ambassade a été intégralement publié, de même que l’ensemble de ses dépêches au Département d’État sur les Arméniens 53, il est facile de vérifier — à condition, certes, de comprendre l’anglais, puisque si le livre de Morgenthau a été traduit dans plusieurs langues, dont le français, les documents publiés, eux, ne l’ont jamais été, étrangement. Ceux qui ne comprennent pas la langue de Shakespeare peuvent se reporter à la traduction française du livre de l’historien américain Heath Lowry, qui donne une liste non exhaustive des mensonges de Morgenthau et ses collaborateurs, en comparant des passages du livre avec les documents de Morgenthau lui-même 54.
- Une fausse citation d’Adolf Hitler
Une citation revient de manière récurrente 55 pour défendre l’accusation de « génocide arménien » : une citation attribuée à Adolf Hitler, dans un discours prononcé devant ses généraux le 22 août 1939 (et pour lequel il n’existe ni de compte-rendu sténographique, ni de manuscrit de la main du Führer). Quand ceux qui l’utilisent daigne donner une source, ils n’indiquent pas de document, mais un livre publié par le journaliste américain Louis Lochner (1887-1975) en 1942 56. Or, la version proposée par Lochner de ce discours prononcé par Hitler a été explicitement rejetée par le Tribunal militaire international de Nuremberg, ainsi d’ailleurs que par la défense des criminels nazis 57.
L’usage de ce faux est d’autant plus choquant que le plus puissant parti nationaliste arménien, la FRA, a collaboré avec l’Italie fasciste à partir de 1928 au plus tard, puis également de l’Allemagne nazie, sur des bases idéologiques 58.
- Les procès de 1919-1920
Ces procès, tous tenus à Istanbul pendant l’occupation de cette ville par l’Entente, sont organisés, principalement, par les deux gouvernements de Damat Ferit Pacha (mars-octobre 1919 ; avril-octobre 1920). La stratégie de Ferit consiste à faire porter toutes les responsabilités possibles et imaginables sur les dirigeants du CUP, afin de sauver l’intégrité de l’Empire ottoman, sous une sorte de protectorat britannique 59. Pour juger les anciens ministres, c’est une cour martiale qui est réunie, or les membres du gouvernement ottoman ne sont justiciables, pour les actes commis pendant l’exercice de leurs fonctions, que devant la Haute Cour 60. La Constitution n’est évidemment pas violée pour le plaisir, mais parce qu’en faisant comparaître ces accusés devant la justice militaire, ils sont privés du droit d’être assistés par un avocat pendant l’instruction, de faire interroger les témoins de l’accusation par leur conseil et de demander une expertise indépendante des documents à charge (le code de justice militaire est changé en 1930) 61. Dès 1919, le haut-commissariat britannique à Istanbul qualifie d’ailleurs ces procès de « farce 62 ». D’avril à octobre 1920, les accusés n’ont même plus le droit d’être assistés par un avocat 63.
Après la chute finale de Ferit, le droit de faire appel, supprimé en 1919, est rétabli pour les procès tenus entre avril et octobre 1920. Tous les accusés encore vivants font appel, et sont acquittés en janvier 1921, soit de toutes les charges, soit de la plupart.
Les falsifications décrites ci-dessus ont servi à justifier le terrorisme arménien des années 1973-1997, notamment l’attentat d’Orly (15 juillet 1983). Elles ont joué un rôle considérable dans la formation de l’idéologie d’Anders Breivik, le terroriste norvégien d’extrême droite. Les répandre n’est pas seulement répandre des contrevérités, mais aussi des bombes en puissance.
Événements de 1915 : quelle est la position des juridictions internationales ?
En octobre 2003, l’association marseillaise Euro-Arménie a déposé un recours devant la Cour de justice des communautés européennes (devenue depuis Cour de justice de l’Union européenne), demandant de suspendre la candidature de la Turquie à l’Union européenne et de la subordonner à la « reconnaissance du génocide arménien », invoquant la résolution adoptée par le Parlement européen en 1987 et où figure une demande (platonique) de « reconnaître » ce « génocide ». Par ordonnance du 17 décembre 2003, le tribunal de première instance a rejeté les demandes et condamné les requérants aux dépens :
« Il suffit de relever à cet égard que la résolution de 1987 est un document contenant des déclarations de caractère purement politique, lesquelles peuvent, à tout moment, être modifiées par le Parlement. Elle ne saurait, de ce fait, produire d’effets juridiques obligatoires à l’égard de son auteur ni, a fortiori, à l’égard des autres institutions défenderesses. »
L’association Euro-Arménie a cru bon d’interjeter un recours contre cette ordonnance. La décision d’appel, le 29 octobre 2004, fut encore plus sèche :
« À cet égard, une simple lecture de la résolution de 1987 permet de constater que le Parlement y exprime un avis de nature politique sur les événements de 1915-1917, et formule des souhaits adressés au Conseil européen, à la Commission, aux États membres de la Communauté, à de nombreux pays tiers ainsi qu’à l’Organisation des Nations Unies. Le Tribunal n’a donc pas commis d’erreur de qualification en considérant que la résolution de 1987 ne contenait que des déclarations à caractère purement politique et que, de ce fait, elle n’était pas susceptible de produire des effets juridiques obligatoires à l’égard de son auteur ni, a fortiori, à l’égard des autres institutions défenderesses. »
En choisissant le terme « événements », la Cour a clairement refusé de prendre la qualification de « génocide » comme allant de soi, comme un fait avéré ; et elle a confirmé la « nature politique » de la résolution adoptée en 1987. Cette même juridiction a rejeté une autre requête de la même association, dix ans plus tard. Euro-Arménie prétendait cette fois contraindre la France à pénaliser ceux qui affirment que la tragédie de 1915-1916 ne répond pas aux critères du génocide. En vain. Ces dernières années, l’Association Euro-Arménie a cessé de faire parler d’elle, peut-être par lassitude de perdre systématiquement.
Le 17 décembre 2013, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la Suisse pour avoir condamné le Dr. Doğu Perinçek, qui avait récusé la qualification de « génocide arménien ».
La motivation de la CEDH mérite d’être citée :
« 116. Par ailleurs, la Cour estime, avec le requérant, que le ‟génocide” est une notion de droit bien définie. Il s’agit d’un fait internationalement illicite qualifié qui peut de nos jours engager la responsabilité aussi bien de l’État, en vertu de l’article 2 de la Convention de 1948 (paragraphe 18 ci-dessus), que celle d’un individu sur la base, notamment, de l’article 5 du Statut de Rome (paragraphe 20 ci-dessus). Selon la jurisprudence de la CIJ et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (paragraphes 21-23 ci-dessus), pour que soit constituée l’infraction de génocide, les membres d’un groupe visé ne doivent pas seulement être pris pour cible à cause de leur appartenance à ce groupe, mais il faut en même temps que les actes commis soient accomplis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, le groupe comme tel (dolus specialis). Il s’agit donc d’une notion de droit très étroite, dont la preuve est par ailleurs difficile à apporter. La Cour n’est pas convaincue que le ‟consensus général” auquel se sont référés les tribunaux suisses pour justifier la condamnation du requérant puisse porter sur ces points de droit très spécifiques.
117. En tout état de cause, il est même douteux qu’il puisse y avoir un ‟consensus général”, en particulier scientifique, sur des événements tels que ceux qui sont en cause ici, étant donné que la recherche historique est par définition controversée et discutable et ne se prête guère à des conclusions définitives ou à des vérités objectives et absolues (voir, dans ce sens, l’arrêt no 235/2007 du Tribunal constitutionnel espagnol, paragraphes 38-40 ci-dessus). À cet égard, la présente espèce se distingue clairement des affaires qui portaient sur la négation des crimes de l’Holocauste (voir, par exemple, l’affaire Robert Faurisson c. France, tranchée par le Comité des droits de l’homme des Nations Unies le 8 novembre 1996, Communication no 550/1993, doc. CCPR/C/58/D/550/1993 (1996)). Premièrement, les requérants dans ces affaires avaient non pas contesté la simple qualification juridique d’un crime, mais nié des faits historiques, parfois très concrets, par exemple l’existence des chambres à gaz. Deuxièmement, les condamnations pour les crimes commis par le régime nazi, dont ces personnes niaient l’existence, avaient une base juridique claire, à savoir l’article 6, alinéa c), du Statut du Tribunal militaire international (de Nuremberg), annexé à l’Accord de Londres du 8 août 1945 (paragraphe 19 ci-dessus). Troisièmement, les faits historiques remis en cause par les intéressés avaient été jugés clairement établis par une juridiction internationale. »
Par arrêt du 15 octobre 2015, la Grande chambre de la CEDH ― devant laquelle la Fédération des associations turques de Suisse romande (FATSR) était d’ailleurs partie prenante au titre de « tiers intervenant » ― a confirmé cette décision. Le Tribunal fédéral a donc annulé sa décision et la justice vaudoise fut contrainte d’indemniser le Dr. Perinçek. Le 28 novembre 2017, la CEDH a de nouveau condamné la Suisse pour le même motif, dans une affaire connexe (Décision Mercan et autres c. Suisse, 28 novembre 2017). Le gouvernement fédéral helvétique a eu cette fois la sagesse de ne pas contester sa condamnation devant la Grande chambre.
Le Conseil constitutionnel français avait, avant même les décisions Perinçek c. Suisse, censuré, en février 2012, une proposition de loi qui prétendait interdire tout débat sur la tragédie de 1915-1916. Plus récemment, il a invoqué la jurisprudence de la CEDH dans son commentaire officiel de sa décision rendue le 8 janvier 2016, décision qui valide la loi dite Gayssot sur l’interdiction du négationnisme (au vrai sens du mot) et refuse de l’étendre au cas arménien. Les tentatives de contourner la jurisprudence du Conseil ont toutes échoué ; la dernière date de 2021 et elle est due à un certain Julien Ravier, déclaré depuis inéligible.
Enfin, la Cour constitutionnelle belge a rendu un arrêt similaire le 14 janvier 2021, qui rejette, en invoquant aussi (paragraphe B.15.2.) l’affaire Perinçek c. Suisse, la demande présentée par le Comité des Arméniens de Belgique, visant à étendre, au bénéfice des nationalistes arméniens, la législation antinégationniste belge.
Le terme « génocide » est un terme juridique, précisément défini par la Convention de Genève de 1948. La position de la justice internationale est donc essentielle. Du reste, les nationalistes arméniens eux-mêmes ruinent leur position en insistant sur la nature juridique de leurs réclamations, alors qu’ils ont systématiquement perdu, en Europe (voir ci-dessus) comme aux États-Unis (où ils avaient présenté des demandes de réparations financières).
Maxime Gauin
Qui est Maxime Gauin ?
Chercheur au Centre d’études eurasiennes (AVIM, Ankara), titulaire d’un master d’histoire contemporaine (Paris-I-Sorbonne), M. Maxime Gauin est l’auteur d’une série d’articles (dont plusieurs ont paru dans des revues universitaires) sur cet épineux sujet. Nous recommandons en particulier : « Review Essay — ‘Proving’ a ‘Crime against Humanity’ ? », Journal of Muslim Minority Affairs, XXXV-1, mars 2015, pp. 141-157, dont une version française est disponible en ligne ; et « A Reply to Vahagn Avedian », European Journal of International Law, XXIII-3, août 2012, pp. 821-835 — revue publiée par les Presses universitaires d’Oxford — (coécrit avec Pulat Tacar, diplomate, chercheur et écrivain).
L’historien français, qui anime le blog “Sources sur la question arménienne“, collabore également régulièrement à différents quotidiens tels que Haaretz, The Jerusalem Post, Hürriyet Daily News, Daily Sabah et Cumhuriyet. En 2019, il acheva sa thèse de doctorat en histoire contemporaine, sur les relations entre la République française et les organisations nationalistes arméniennes, de 1918 à 1923.
Références :
1 CEDH, Perinçek c. Suisse, Requête n° 27510/08, 15 octobre 2015, § 231 ; Conseil constitutionnel, Décision n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017, § 196.
2 Dépêche du vice-consul de France à Maraş, 6 août 1862, Centre des archives diplomatiques de Nantes (CADN), microfilm 2 Mi 2566; Louise Nalbandian, The Armenian Revolutionary Movement, Berkeley-Los Angeles-London: University of California Press, 1963, pp. 66-76.
3 Le 19 mai 1879, l’ambassade ottomane à Paris remet au Quai d’Orsay une traduction en français des documents saisis après l’écrasement cette révolte : Archives du ministère des Affaires étrangères (AMAE), La Courneuve, 75 ADP 41.
4 Jeremy Salt, Imperialism, Evangelism and the Ottoman Armenians (1878-1896), Londres-Portland, Frank Cass, 1993.
5 Gaston Auboyneau, La Journée du 26 août 1896 à la Banque impériale ottomane, Villeurbanne : Imprimerie Chaix, 1912 (pp. 28 et 34 en particulier) ; William L. Langer, The Diplomacy of Imperialism. 1890–1902, New York, Alfred A. Knopf, 1960, 150-160, 204-210 et 349-350.
6 Ömer Turan, The Turkish Minority in Bulgaria (1878-1908), Ankara, Türk Tarih Kurumu, 1998, pp. 79-98.
7 « Correspondance — Constantinople », Les Missions catholiques, 10 septembre 1880, p. 434 ; Ömer Turan, « Sharing the Same Fate: Muslims and Jews of the Balkans », dans Michael Laskier et Yaacov Lev, The Divergence of Judaism and Islam. Interdependence, Modernity and Political Turmoil, Miami, University Press of Florida, 2011, pp. 51-73.
9 E. Aknouni, Les Plaies du Caucase, Genève, Fédération révolutionnaire arménienne, 1905.
10 Le vice-consul de France à Mersin et Adana au ministre des Affaires étrangères, 23 octobre 1908, AMAE, P 16742; Kemal Çiçek (dir.), The Adana Incidents of 1909 Revisited, Ankara, Türk Tarih Kurumu, 2011; Yücel Güçlü, The Armenian Events of Adana in 1909: Cemal Paşa and Beyond, Lanham (Maryland), Hamilton Books, 2018.
11 Hasan Oktay, « On the Assassination of Van Mayor Kapamaciyan by the Tashnak Committee », Review of Armenian Studies, n° 1, 2002, pp. 79-89; Kapriel Serope Papazian, Patriotism Perverted, Boston, Baikar Press, 1934, p. 69.
12 Je reprends ici une partie des arguments développés dans mon chapitre à paraître : Maxime Gauin, « Uneven Repression: The Ottoman State and its Armenians », dans Edward J. Erickson (dir.), A Global History of Relocation in Counterinsurgency Warfare, Londres, Bloomsbury, 2019 (ouvrage qui sera publié en décembre).
13 Justin McCarthy, Death and Exile. The Ethnic Cleansing of Ottoman Muslims, 1821-1922, Darwin Press, 1995, pp. 135-177 et 339.
14 Sinan Kuneralp (éd.), Une ambassadrice de France à Constantinople. Les souvenirs de Gabrielle Bompard de Blignières, 1909-1914, İstanbul: Les éditions Isis, 2016, 74-76 ; Xavier de Planhol, Les Nations du Prophète, Paris: Fayard, 1993, pp. 692-699. Pour une démolition méthodique de la thèse de « l’ingénierie démographique » : Ahmet Efiloğlu, « Fuat Dündar and the Deportation of the Greeks », Middle East Critique, XXIII-1, 2014, pp. 89-106; Ahmet Efiloğlu, « The Exodus of Thracian Greeks to Greece in the Post-Balkan War Era », dans Hakan Yavuz et Feroz Ahmad (dir.), War and Collapse, Salt Lake City, University of Utah Press, 2016, pp. 330-370.
15 Michael A. Reynolds, « Buffers, not Brethren: Young Turk Military Policy in the First World War and the Myth of Panturanism », Past and Present, n° 203, mai 2009, 137-179.
16 Paul Dumont, « Bolchevisme et Orient », Cahiers du monde russe et soviétique, XVII-4, octobre-décembre 1977, p. 379.
17 Hovannes Katchaznouni, The Armenian Revolutionary Federation Has Nothing to Do Anymore, New York, Armenian Information Service, 1955, p. 5 (version originale, en arménien, Bucharest, 1923).
18 Muammer Demirel (éd.), British Documents on Armenians (1896-1918), Ankara, Yeni Türkiye, 2002, p. 665.
19 Sean McMeekin, The Russian Origins of the First World War, Cambridge (Massachusetts)-Londres, Harvard University Press, 2011, pp. 154 et 278, n. 75.
20 Kâmuran Gürün, Le Dossier arménien, Paris, Triangle, 1984, p. 238.
21 Muammer Demirel (éd.), British Documents on…, p. 643.
22 Le vice-consul de France à Van au ministre des Affaires étrangères, 10 octobre 1914, AMAE, P 16745.
23 Justin McCarthy, East Arslan, Cemalettin Taşkıran et Ömer Turan, The Armenian Rebellion at Van, Salt Lake City, University of Utah Press, 2006, pp. 176-232; Sean McMeekin, The Russian Origins…, pp. 168-169; Rafael de Nogales, Memoirs of a Soldier of Fortune, New York, Harrisson Smith, 1932, p. 271.
24 Edward J. Erickson, Ottomans and Armenians. A Study in Counter-Insurgency, New York-Londres, Palgrave MacMillan, 2013, pp. 168-169 et 172-182.
25 Michael A. Reynolds, Shattering Empires. The Clash and Collapse of the Ottoman and Russian Empires, 1908-1918, Cambridge-New York, Cambridge University Press, 2011, pp. 156-158 et 194; Gustave Gautherot, La France en Syrie et en Cilicie, Courbevoie : Librairie indépendante, 1920, pp. 136 et 146-166; Paul Caujole, Les Tribulations d’une ambulance française en Perse, Paris, Les Gémeaux, 1922, pp. 80-94, 101 et 103 ; Nicolas Gasfield, « Au front de Perse pendant la Grande guerre — Souvenirs d’un officier français », Revue d’histoire de la Guerre mondiale, II-3, juillet 1924, p. 132-133 ; Kara Schemsi, Turcs et Arméniens devant l’histoire, Genève, Imprimerie nationale, 1919 ; Lieutenant-colonel Vladimir Twerdokhleboff, Notes d’un officier supérieur russe sur les atrocités d’Erzéroum, İstanbul, 1919.
26 Note de l’ambassadeur de Russie à Paris, 23 février 1915, dans Arthur Beylerian (éd.), Les Grandes Puissances, l’Empire ottoman et les Arméniens dans les archives françaises (1914- 1918), Paris, 1983, p. 7 ; Note du Comité de la défense nationale arménienne, juillet 1915, dans Jean-Claude Montant (ed.), Documents diplomatiques français. 1915, volume III, 15 septembre – 21 décembre, Berne, Peter Lang, 2004, p. 98.
27 La rivalité franco-britannique, le souhait encore majoritaire, au Quai d’Orsay, au début de 1915, de garder l’Empire ottoman, des difficultés techniques, et l’idée de Winston Churchill, alors ministre de la Marine, de tout miser sur l’opération aux Dardanelles (Çanakkale).
28 Edward J. Erickson, « Captain Larkin and the Turks: The Strategic Impact of the Operations of HMS Doris in Early 1915 », Middle Eastern Studies, XLVI-1, janvier 2010, p. 151-162.
29 Yusuf Sarınay, « What Happened on April 24, 1915? The Circular of April 24, 1915, and the Arrest of Armenian Committee Members in Istanbul », International Journal of Turkish Studies, XIV-1 & 2, automne 2008, pp. 75-101.
30 Edward J. Erickson, Ottomans and Armenians…, pp. 81-96
31 O. J. Campbell, Report on the Vilayet of Konya, p. 8, Hoover Institution Archives, Stanford University (Californie), Paris Peace Conference (1919-1920), U.S. territorial section, carton 4; S.R. Marine, Turquie, n° 1351, 25 novembre 1919, Service historique de la défense, 1 BB7 235; Edward Erickson, Ottomans and Armenians…, pp. 216-217.
32 Mehmet Biçici, « Osmanlı Meclis-I Mebusânı’nda Ermeni Mebuslar ve Faaliyetleri (1914-1918) », in 19.-20. Yüzyıllarda Türk-Ermeni İlişkileri, İstanbul: İstanbul Üniversitesi/Türk Ocakları, 2015, tome I, pp. 357-359 et 366-367.
33 S.R. Marine, Turquie, n° 532, 4 avril 1919, CADN, 36 PO/1/7.
34 Semi Ertan, An Armenian at the Turkish Parliament in the Early Republican Period: Berç Türker Keresteciyan, mémoire de master, Sabancı University, 2005; Yücel Güçlü, The Holocaust the Armenian Case in Comparative Perspective, Lanham-Boulder-New York-Toronto-Plymouth, University Press of America, 2012, p. 86.
35 Guenter Lewy, The Armenian Massacres in Ottoman Turkey, Salt Lake City, University of Utah Press, 2005, pp. 235-239; Justin McCarthy, Muslims and Minorities. The Population of Ottoman Anatolia and the End of the Empire, New York-Londres, New York University Press, 1983, pp. 121-130.
36 Richard G. Hovannisian, Armenia on the Road to Independence, Berkeley-Los Angeles-Londres, University of California Press, 1967, p. 67; Colonel Chardigny, « La question arménienne », 30 octobre 1919, SHD, 16 N 3187, dossier 4.
37 Guenter Lewy, The Armenian Massacres…, pp. 163-166 et 180-187.
38 Hilmar Kaiser, « Regional Resistance to Central Government Policies: Ahmed Djemal Pasha, the Governors of Aleppo and Armenian Deportees in the Spring and Summer of 1915 », Journal of Genocide Research, XII-3/4, 2010, pp. 173-218.
39 Télégramme de l’ambassadeur allemand Paul von Wolff-Metternich, 18 décembre 1915, http://www.armenocide.net/armenocide/armgende.nsf/$$AllDocs/1915-12-18-DE-001
40 Minutes du conseil des ministres, 29 septembre 1915, reproduites dans Hikmet Özdemir et Yusuf Sarınay, Turkish-Armenian Conflict Documents, Ankara, TBMM, 2007, p. 294.
41 Yusuf Sarınay, « The Relocation (Tehcir) of Armenians and the Trials of 1915–1916 », Middle East Critique, III-20, automne 2011, pp. 299–315.
42 Kâmuran Gürün, Le Dossier arménien…, p. 259.
43 Taner Akçam, The Young Turks’ Crime against Humanity, Princeton, 2012, pp. 202-203.
44 Hikmet Özdemir et Yusuf Sarınay (éd.), Turkish-Armenian Conflict…, p. 235.
45 Gwynner Dyer, « Correspondence », Middle Eastern Studies, IX-3, octobre 1973, pp. 379-382.
46 Nora Arissian, « Comparative Aspects of the Armenian and Jewish Cases » dans Richard G. Hovannisian (dir.), The Armenian Genocide: Cultural and Ethical Legacies, New Brunswick-Londres, Transaction Publishers, 2007, pp. 298-299; Raymond Kévorkian, Le Génocide des Arméniens, Paris, Odile Jacob, 2006, pp. 92 et 311.
47 Gwynne Dyer, “Correspondence…”, pp. 377-379.
48 Ali İhsan Sabis, Harp Hatıralarım : Birinci Cihan Harbi, İstanbul, Nehir Yayınları, 1990, tome II, p. 378.
49 « Donald Bloxham Replies », History Today, n° LV-7, juillet 2005, p. 68.
50 Arthur Beylerian, Les Grandes Puissances…, pp. XXIX-XXX (aussi contestable que soit, en plusieurs endroits, le choix effectué par feu Beylerian parmi les documents qu’il a compilés, le recueil lui-même doit être distingué de l’introduction, citée ici, et qui est bien pire); Vahakn N. Dadrian, Histoire du génocide arménien, Paris, Stock, 1996, p. 370, n. 1; Yves Ternon, Les Arméniens, histoire d’un génocide, Paris, Le Seuil, 1996, pp. 223-224.
51 Maxime Gauin, « Faux et usage de faux : les “documents Andonian” », 21 avril 2016 ; Ömer Engin Lütem et Yiğit Alpogan, “Review Essay: ‘Killing Orders: Talat Pasha’s Telegrams and the Armenian genocide’”, Review of Armenian Studies, n° 37, 2018, pp. 45-82; Şinasi Orel et Sürreya Yuca, Les « Télégrammes » de Talat Pacha. Fait historique ou fiction ?, Paris, Triangle, 1986. L’historien anglo-américain Bernard Lewis compare même les « documents Andonian » aux Protocoles des Sages de Sion, un faux fabriqué en 1900 sur ordre de la police politique tsariste : Bernard Lewis, From Babel to Dragoman. Interpreting the Middle East, Oxford-New York, Oxford University Press, 2004, p. 389.
52 Henry Morgenthau, Ambassador Morgenthau’s Story, Garden City (New York), Doubleday & C°, 1918, pp. 13, 99, 279-280, 284-285 et 287-288, 295, 328, 365, 369 et passim.
53 Ara Sarafian (éd.), United States Diplomacy On The Bosphorus: The Diaries Of Ambassador Morgenthau 1913-1916, Londres, Taderon Press, 2004; Ara Sarafian (éd.), United States Documents on the Armenian Genocide, Londres, Taderon Press, 2004.
54 Heath Lowry, Les Dessous des Mémoires de l’ambassadeur Morgenthau, Istanbul, Les éditions Isis, 1991.
55 Peter Balakian, The Burning Tigris, New York, Perennial, 2004, p. 129 ; Comité de soutien à Max Kilndjian, Les Arméniens en cour d’assises. Terroristes ou résistants ?, Roquevaire, Parenthèses, 1983, p. 199 ; Jacques Nazarian, Robert Donikian et Vartkès Solakian, Le Deuil national arménien, Lyon, Centre d’études arméniennes, 1965, p. 129.
56 Louis Lochner, What About Germany?, New York, Dod, Mead, & C°, 1942, pp. 1-2.
57 Procès des grands criminels de guerre devant le Tribunal militaire international de Nuremberg, Nuremberg, Imprimerie du TMI, tome II, Débats. 14 novembre 1945-30 novembre 1945, 1947, pp. 290-295.
58 Georges Mamoulia, « L’histoire du groupe Caucase (1934-1939) », Cahiers du monde russe, 2007/1, pp. 55-57 ; Georges Mamoulia, « Le Caucase dans les plans stratégiques de l’Allemagne (1941-1945) », Cahiers du CEHD, n° 29, 2006, pp. 47-57, 65, 67-70 ; Mehmet Perinçek, « Nazi-Dachnak Collaboration During World War II », dans AVIM (dir.), Turkish-Russian Academics. A Historical Study on the Caucasus, Ankara, Terazi, 2016, pp. 199-231.
59 Hüsamettin Ertürk, İki Devrin Perde Arkası, İstanbul, Hilmi Kitapevi, 1957, pp. 370-373 ; Laurence Evans, United States Policy and the Partition of Turkey (1914-1924), Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1965, pp. 193-194 ; Berthe Georges-Gaulis, Le Nationalisme turc, Paris, Plon, 1921, p. 30; Maclolm E. Yapp, « Book review », Middle Eastern Studies, XXXII-4, octobre 1996, p. 397.
60 Şeref Gözübüyük et Suna Killi, Türk Anayasa Metinleri, Ankara, Ajans-Türk Matbaası, 1957, p. 28.
61 Guenter Lewy, The Armenian Massacres…, p. 79.
62 Mémorandum de la section des affaires arméniennes et grecques, transmis à Londres le 1er août 1919 par le haut-commissaire, The National Archives, Kew Gardens (Londres), FO 371/4174/118377, folio 256.
63 Une traduction en français du nouveau règlement édicté par le second cabinet Damat Ferit se trouve dans S.R. Marine, Turquie, n° 2036, 27 avril 1920, SHD, 1 BB7 235.
Article édité le 30 mars 2020 et mis à jour le 23 mai 2024